Tuesday, 29 January 2013

- 1er février - SAINT IGNACE, ÉVÊQUE D’ANTIOCHE ET MARTYR ( Ier et IIe SIÈCLES ).


-      1er février –
-      SAINT IGNACE,
-      ÉVÊQUE D’ANTIOCHE ET MARTYR ( Ier et IIe SIÈCLES ).

Ignace, surnommé Théophore par ses contemporains, est l’un des plus illustres disciples des Apôtres, et sans contredit l’un de ceux qui, par leur courage et leur foi, ont le plus puissamment contribué à l’établissement et à la propagation de la religion de Jésus-Christ.
Les historiens de sa vie et les monuments de l’Église grecque ne nous ont à peu près rien transmis de certain sur sa naissance, sa jeunesse et sa vie privée avant son épiscopat.
Selon une ancienne tradition, Ignace serait ce petit enfant que Notre-Seigneur Jésus-Christ prit un jour et plaça au milieu de ses disciples en leur disant :
« Si vous ne devenez semblable à ce petit enfant, vous n’entrerez point au royaume des cieux. »
Sa jeunesse aurait été formée par l’apôtre saint Jean.
Ignace succéda à saint Évode dans le gouvernement de l’Église d’Antioche.
On sait que cette ville avait été le premier siège de l’apostolat de saint Pierre, qui ne vint se fixer à Rome que dans la deuxième année du règne de Claude.
En transférant dans la ville des Césars le centre de son autorité souveraine, le prince des Apôtres avait établi Évode son successeur immédiat ;
il avait en même temps imposé les mains à Ignace, et l’avait consacré évêque en le désignant comme successeur d’Évode, dans la crainte que les persécutions n’interrompissent la succession apostolique.
Saint Pierre fit depuis la même chose à Rome, en sacrant évêques Luc, Anaclet et Clément, non pour y gouverner l’Église après lui simultanément, en se partageant les ministères, mais pour qu’ils se succédassent l’un à l’autre.
Ce qui caractérise la vie et l’épiscopat de saint Ignace, ce sont la vivacité extraordinaire de sa foi et l’ardeur insatiable de sa charité.
Il avait puisé l’une à l’école de saint Pierre, et l’autre dans sa familiarité avec l’apôtre saint Jean.
Ces deux vertus éclatent dans tous les détails de sa conduite, dans ses écrits et dans les actes de son martyre.
Sous Domitien, saint Ignace gouverna en paix son Église, qui jouit encore du calme sous Nerva, mais à l’avènement de Trajan, la persécution se renouvela dans quelques provinces de l’empire.
Ce prince attribuait sa victoire sur les Daces à la protection de ses dieux, il voulut forcer les chrétiens à les adorer.
Il vint à Antioche, la neuvième année de son règne, et bientôt Ignace fut amené devant lui.

 Qui es-tu, malheureux, dit Trajan, pour mépriser nos ordres et persuader aux autres de se perdre ?
 Je suis Ignace Théophore ( c’est-à dire portant DIEU en moi ).
 Qui est celui qui porte DIEU ?
 Celui qui a Jésus-Christ dans le cœur.
 Tu crois donc que nous n’avons pas dans le cœur les dieux qui combattent avec nous contre nos ennemis.
 C’est à tort que vous appelez dieux les démons des Gentils. Il n’y a qu’un Dieu qui a fait le ciel et la terre, et la mer et tout ce qu’ils contiennent ; et il n’y a qu’un seul Jésus-Christ, Fils unique de DIEU, au royaume duquel j’aspire.
 Est-ce que tu parles de celui qui a été crucifié sous Ponce Pilate ?
 Oui, de celui qui a crucifié mon péché avec son auteur, et qui met toute la malice du démon sous les pieds de ceux qui le portent dans leur cœur.
 Tu portes donc en toi le Crucifié ?
 Oui, car il est écrit : j’habiterai et marcherai en eux. »

À ces mots, Trajan prononce cette sentence :
« Nous ordonnons qu’Ignace, qui dit porter en lui le crucifié, soit enchaîné et conduit à Rome pour y être dévoré par les bêtes, et y servir de spectacle au peuple. »
Et aussitôt Ignace de s’écrier, dans un transport de joie :
« Je vous rends grâce, Seigneur, de m’avoir honoré de la charité parfaite envers vous, et d’être chargé de chaînes de fer comme votre apôtre Paul. »
Il dit, on le charge de chaînes ; il prie pour son Église, la recommande à DIEU avec larmes, et est enlevé par les soldats.
Or c’était les plus fameux criminels qu’on avait coutume d’envoyer à Rome, de toutes les provinces, et l’empereur regardait comme tel le chef des chrétiens de la grande Antioche, capitale de l’Orient.
Les lois anciennes défendaient, il est vrai, de battre de verges et de jeter aux bêtes un citoyen romain ; mais la haine armée de la toute-puissance, ne connaît plus de lois ; les édits des empereurs persécuteurs les avaient abrogées à l’égard des chrétiens.
Ignace part donc pour Rome avec la certitude du supplice qui l’y attend, et pourtant tout joyeux, au fond du cœur, de donner son sang pour Jésus-Christ.
Arrivé à Séleucie, on l’embarque avec dix soldats pour le garder.
Ignace les compare à des léopards, tant étaient barbares leurs procédés !
On embarque aussi avec lui trois de ses disciples, Reus, Agathopus de Syrie et Philon, diacre de Cilicie.
Après de grandes fatigues, ils abordent à Smyrne.
C’était pour Ignace une occasion providentielle de revoir Polycarpe, évêque de cette ville, et autrefois disciple, comme lui, des saints Apôtres et surtout de saint Jean.
Il descend à terre, et demande aussitôt à être conduit chez son ancien ami.
Qu’elle dut être intime l’effusion de ces deux amis dans une telle rencontre ! Ils se communiquèrent les grâces spirituelles, disent les anciens actes, sans doute par le sacrement d’Eucharistie, qui en est la source et dans lequel ils puisaient le courage invincible dont ils avaient besoin.
Muni de ce pain des forts, Ignace, en quelque sorte, plus fier de ses chaînes, supplia Polycarpe de concourir, avec toutes les Églises voisines, à l’accomplissement de son martyre.
Là se trouvaient des députés de toutes les Églises voisines, qui s’étaient empressées de venir au devant du saint : c’était Onésime, évêque d’Éphèse, disciple de saint Paul, avec quatre compagnons ( I )
( I ) [ Crocus, Burrus, Euplus et Fronton, cités avec éloge dans la lettre d’Ignace aux Éphésiens. ]
; Damas, évêque de Magnésie, sur le Méandre, avec deux prêtres ( II )
( II ) [ Bassus et Apollonius. Voy. l’épître aux Magnésiens. ]
et un diacre,
( III ) [ Sotion. Ibid. ]
et Polybe, évêque de Tralles.
Afin de témoigner sa reconnaissance envers ces trois Églises, Ignace leur écrivit, par leurs députés, des lettres dans lesquelles se révèle l’esprit primitif et véritable du Christianisme, c’est-à-dire une vraie foi en Jésus-Christ, une conviction entière à sa divinité, une humilité profonde, une charité héroïque quand il s’agit de la gloire de DIEU ou du salut de nos frères, et un dévoûment sans limites à l’Église de Jésus-Christ.
« Je ne prétends pas vous ordonner comme si j’étais quelque chose, disait-il dans sa lettre aux Éphésiens ... Je ne fais que commencer à être disciple ... Vous êtes heureux d’être unis à votre évêque, comme l’Église à Jésus-Christ et Jésus-Christ au Père ... Tous ceux que le père de famille envoie pour le gouvernement de sa maison, nous devons les recevoir comme celui qui les envoie. Aussi devons-nous regarder l’évêque comme le Seigneur lui-même ... J’ai su qu’il a passé chez vous des gens qui tiennent une mauvaise doctrine et que vous avez bouché l’oreille à leurs discours ... Je suis ravi de ce que, dans l’espérance d’une meilleure vie, vous n’aimez que DIEU seul ... Priez sans cesse pour les autres hommes, afin qu’ils se convertissent et qu’ils puissent jouir de DIEU. Donnez-leur le moyen de s’instruire, du moins par vos œuvres. Opposez à leurs emportements votre douceur, à leurs paroles hautaines votre humilité, à leurs injures vos prières, à leurs erreurs votre fermeté dans la foi, à leur férocité votre humanité. Gardons-nous de les imiter, mais soyons leurs frères par la charité ... Cherchons, au contraire, à aimer et à imiter Jésus-Christ. Que ce soit à qui souffrira le plus d’injustices, de pertes et de mépris pour lui. C’est pour lui que je porte mes chaînes, ces perles spirituelles. »
« Il est nécessaire, dit-il aux Tralliens, de ne rien faire sans l’évêque, et d’être soumis aux prêtres eux-mêmes comme aux apôtres ... Gardez-vous du venin des hérétiques, et restez inviolablement attachés à l’Église. »
Cette recommandation revient encore dans les épîtres aux Philadelphiens, aux Smyrniens et à saint Polycarpe. ( I )
[ Voy. la partie de cette épître qui s’adresse à toute l’église de Smyrne. ]  
Il est consolant de voir la constitution de l’Église si clairement marquée, et son unité si fortement recommandée dès les premiers jours de son existence et dès ses premiers combats.
Ignace n’a encore parlé, il est vrai, que des évêques et des prêtres ; mais la suprématie de l’Église mère est expressément reconnue par lui dans son épître aux Romains, la plus célèbre de toutes.
On sait que cette lettre fut écrite de Smyrne et envoyée par des Éphésiens qui allaient directement à Rome et devaient y arriver avant Ignace.
Son but était de supplier les fidèles romains de ne rien faire pour empêcher son martyre.
« Je crains que votre charité ne me nuise,  leur disait-il ... , Je ne veux pas avoir pour vous une complaisance humaine ; mon unique désir est de plaire à DIEU ... Je n’aurai jamais une si belle occasion d’arriver à Lui ; et vous, si vous demeurez en repos, jamais vous n’aurez l’honneur d’une œuvre meilleure ... Vous ne sauriez me procurer un plus grand bien, que d’être immolé à DIEU tandis que l’autel est prêt ... J’écris aux Églises et leur mande, à toutes, que je meurs volontairement pour DIEU, si vous ne m’en empêchez. Je vous en conjure, ne m’aimez pas à contre temps. Souffrez que je sois la pâture des bêtes qui me feront jouir de DIEU ... Flattez-les afin qu’elles soient mon tombeau, et qu’elles ne laissent rien de mon corps, de peur qu’après ma mort, je ne sois à charge de quelqu’un. Je serai un vrai disciple de Jésus-Christ quand le monde ne verra pas mon corps ... J’apprends, dès à présent, dans mes chaînes, à ne rien désirer de temporel ou de vain.
Depuis la Syrie je combats contre les bêtes, par terre et par mer, le jour et la nuit, lié, que je suis, avec dix léopards, qui se montrent d’autant plus féroces qu’on leur fait plus de bien ; leurs mauvais traitements m’instruisent, et je ne me crois pas justifié pour cela. DIEU veuille que je jouisse des bêtes qui me sont préparées. Je souhaite de les trouver bien prêtes. Je les flatterai afin qu’elles me dévorent promptement, et qu’il ne m’arrive pas, comme à quelques-uns qu’elles n’ont osé toucher. Si elles ne voulaient pas, je les forcerais. Pardonnez-moi ; je fais ce qui m’est utile. Je commence maintenant à être disciple de Jésus-Christ. Aucune créature, visible ou invisible ne m’empêchera  d’arriver à lui. Le feu, la croix, les bêtes féroces, le brisement de mes os, le déchirement de mes membres, le broyement de tout mon corps, en un mot, les tourments les plus cruels peuvent m’assaillir, pourvu que je jouisse de Jésus-Christ. Les plaisirs du siècle et les royaumes de ce monde ne me serviraient de rien. Il vaut mieux que je meure pour Jésus-Christ, que de régner sur toute la terre. »
Toutes ces épîtres, au rapport d’Eusèbe et de saint Jérôme ( I ),
( I ) [ Eus. III, Hist., c. 36. S. Jérôme. de Scriptor., eccles. Ign. ]
étaient connues de toute l’Église primitive, et on les lisait publiquement dans les églises d’Asie.
Enfin Ignace arrive à Rome par Troade, Naples, Philippi, la Macédonie, Duras, la mer de Toscane et le Tibre.
Les frères, en étant avertis, se précipitent à sa rencontre, pleins de crainte et de joie.
Ils se réjouissent de l’honneur d’avoir Ignace avec eux ; mais ils savent qu’on le mène à la mort.
Quelques-uns s’efforcent d’apaiser le fanatisme barbare du peuple païen, mais Ignace leur impose silence et les conjure, plus vivement encore que dans sa lettre, d’avoir pour lui une vraie charité et de ne pas lui envier le bonheur d’aller à DIEU.
Il se met à genoux, prie pour les Églises, exhorte tous les frères à l’union ; puis on le conduit en toute hâte à l’amphithéâtre.
C’était la fête des Sigillaria, le 13e des calendes de janvier, qui correspondait au 20 décembre ; il fallait par conséquent des réjouissances publiques et jeter quelques chrétiens aux lions.
Le peuple s’était rendu en foule, et les bêtes furent si cruelles que le saint martyr fut aussitôt dévoré. Il ne resta de son corps que les plus gros ossements.
Le peu que les lions dédaignèrent fut recueilli avec soin et reporté à Antioche comme un trésor inestimable.
Partout sur le passage de ces précieuses reliques, les fidèles s’empressèrent de leur rendre des honneurs et des hommages.
À Antioche on les mit avec respect dans une châsse et on les ensevelit dans le cimetière qui était près de la porte de Daphné.
De telles scènes étaient de nature à produire un effet diamétralement contraire à celui que poursuivaient Trajan et ses proconsuls.
Aussi, Pline le Jeune, qui avait déjà obtenu quelque adoucissement par une première lettre en faveur des chrétiens ( II ),

( II )  Voy. cette première lettre dans Boll. et dans  tous les historiens de l’Église.
crut devoir écrire de nouveau.
Il expose cette fois à l’empereur les progrès chaque jour croissants de la secte, malgré les mauvais traitements qu’elle subit, le courage héroïque de ses martyrs, et il conclut en demandant des instructions nouvelles en présence de ces nouvelles circonstances.
Trajan accueille favorablement ces observations ; il défend qu’on mette désormais à mort les chrétiens, et se contente  de les exclure des charges et des dignités publiques.
Ces deux monuments signalent une ère de paix pour les chrétiens d’Orient ; on les retrouve dans les Bollandistes au 1er février.

PRATIQUES. — Souvenons-nous que nous sommes les enfants des Saints, les héritiers de leur foi, destinés comme eux à une gloire immortelle dont le prix a été rien de moins que le sang de Jésus-Christ. Le privilège du martyre est rare de nos jours. Soyons apôtres de la vérité par nos paroles, nos écrits et nos exemples, puisqu’il ne nous est pas donné d’en être les martyrs par le sacrifice de notre vie et par l’effusion de notre sang.  

PRIÈRE. — Seigneur, répandez sur nous un peu de ce feu sacré qui inspira à vos martyrs tant d’héroïsme ! Nous vous le demandons par Notre Seigneur Jésus-Christ, votre divin Fils, qui vit et règne avec vous dans les siècles des siècles.
A.I.

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