Saturday 28 December 2013

SAINT MATTHIEU CHAPITRE II 16 ET 17 Commentaires

LA SAINTE BIBLE
ÉVANGILE SELON SAINT MATTHIEU
COMMENTAIRES Par M. l’abbé L. CL. FILLION
TRADUCTION FRANÇAISE Par M. l’abbé BAYLE
P. LETHIELLEUX 1895

CHAPITRE II

16. Tunc Herodes videns quoniam illusus esset a magis, iratus est valde: et mittens occidit omnes  pueros qui erant in Bethlehem, et in omnibus finibus ejus, a bimatu et infra, secundum tempus quod exquisierat a magis.
16. Alors Hérode, voyant qu’il avait été trompé par les mages, s’irrita violemment et envoya tuer tous les enfants qui étaient à Bethléem et dans tous ses environs, depuis l’âge de deux ans et au-dessous selon le temps dont il s’était enquis auprès des mages.

17. Tunc adimpletum est quod dictum est per Jeremiam prophetam dicentem:
17. Alors s’accomplit ce qui avait été dit par le prophète Jérémie disant:

18. Vox in Rama audita est, ploratus et ululatus multus: Rachel plorans filios csuos, et noluit consolari, quia non sunt.
18. Une voix a été entendue à Rama, des pleurs et des sanglots incessants, Rachel pleurant ses fils et ne voulant pas être consolée parce qu’ils ne sont plus.
Jer. XXXI , 18.


17 et 18. – Tunc adimpletum est. Par cet acte barbare, Hérode accomplissait sans le savoir une prophétie messianique. – Per Jeremiam, XXXI, 15. Ici encore, S. Matthieu s’écarte tout à la fois du texte hébreu et de la version d’Alexandrie; mais la divergence est très-légère et n’atteint que l’expression. De même que la parole d’Osée citée au V/ 15, ce beau passage de Jérémie a une double signification, l’une verbale, l’autre typique. Suivant le sens verbal, il concerne la déportation des juifs en Chaldée, après le triomphe de Nabuchodonosor et la chute du royaume de Juda. Rachel avait été enterrée non loin de Bethléem, Cf. Gen. XXXV, 19. Par une admirable figure, le prophète suppose qu’au moment où les descendants de Benjamin, qui faisaient partie du royaume de Juda, étaient conduits en exil, elle sortit de son tombeau, poussant des gémissements lugubres, comme une mère à qui l’on arrache ses fils et que rien ne peut consoler de cette déchirante séparation. Mais, comme le dit Saint Augustin, les divines écritures ont souvent plus d’un sens: « Habet, scriptura sacra haustus primos, habet secundos, habet tertios », et il faut que ces divers sens, quand ils ont été voulus par DIEU, s’accomplissent jusqu’à un iota, selon la parole de Jésus-Christ. La prophétie de Jérémie devait donc trouver plus tard une seconde réalisation, supérieure à la première. Rachel sortit une seconde fois de sa tombe pour pleurer amèrement, au nom des pauvres mères de Bethléem, sur les innocentes victimes de la tyrannie d’Hérode: son deuil d’autrefois était un type de son deuil actuel. Les littérateurs ont maintes fois admiré cette personnification pathétique. – In Rama. Rama, suivant quelques exégètes, serait un nom commun qui désignerait les hauteurs de Bethléem. En effet, râm signifie « élevé », et c’est ainsi que Saint Jérôme traduit dans la Vulgate le texte hébreu de Jérémie: « Vox in excelso audita est ». Mais Rama est plus probablement un nom propre, celui d’une petite ville située à deux lieues au Nord de Jérusalem, et dont les ruines sont encore appelées Er-Râm par les Arabes. C’est là que les exilés furent réunis avant leur départ pour la Chaldée; Cf. Jer. XL, 1 et suiv. Le sépulcre de Rachel en est assez éloigné, puisqu’on le montre à deux autres lieues au Sud de Jérusalem (Kubbet-Rachil); mais de nombreux commentateurs ont justement pensé « non indicari locum ubi clamor ortus sit, sed ad quem dimanarit, ut adeo significetur longe lateque clamorem esse auditum », Kuinɶl, in h. J. On peut dire aussi que Jérémie évoque à Rama l’ombre de Rachel. – Ploratus et ululatus. En grec, il y a trois substantifs synonymes au lieu de deux θρηνος  καί κλαυθμος καί οδυρμος πολυς, ce qui rehausse et fortifie davantage encore la pensée. Dans sa prophétie, Jérémie ajoute, après la description tragique de ce grand deuil: « Haec dicit Dominus: Quiescat vox tua a ploratu, et oculi tui a lacrymis; quia est  merces operi tuo, sit Dominus,  et revertentur de terra inimici, et est spes novissimis tuis ... et revertentur filii tui ad terminos suos », XXXI, 16 et 17. De même dans la circonstance présente: le Messie, l’enfant bien-aimé de Rachel, est sauvé; qu’elle se console! Il reviendra bientôt de la terre d’exil pour le salut et le bonheur de tous. – La peinture et la poésie ont rivalisé de zèle pour célébrer le martyre des saints Innocents. On connaît à ce sujet les hymnes ravissantes de Prudence, insérées dans le bréviaire romain,
« Audit tyrannus anxius » et « Salvete flores martyrum ». On connaît aussi les belles toiles du Guide, de Rubens, de Nicolas Poussin, de Matteo di Giovanni. – Terminons ce touchant récit par deux pensées de Saint Augustin. « Jure Innocentes dicuntur martyrum flores, quos inmedio frigore infidelitatis exortos, velut primas erumpentes Ecclesiae gemmas quaedam pruina persecutionis decoxit », serm. III. « O parvuli beati, modo nati, nondum tentati, nondum lactati, jam coronati ! »

-----------------------------------------------------------CRAMPON 1923 Mat. II 16-18
Alors Hérode, voyant que les mages s’étaient joués de lui, entra dans une grande colère, et il envoya tuer tous les enfants qui étaient à Bethléem et dans tout son territoire, depuis l’âge de deux ans et au-dessous, d’après le temps qu’il connaissait exactement par les mages.
Alors fut accompli l’oracle du prophète Jérémie disant: Une voix a été entendue à Rama, des plaintes et des cris lamentables: Rachel pleure ses enfants; et elle n’a pas voulu être consolée parce qu’ils ne sont plus.
Note
18. Rachel, la mère de Benjamin et des Benjamites, avait été inhumée non loin de Bethléem ( Gen, XXXV, 19 ).
Jérémie ( XXXI, 15) la représente pleurant ses enfants réunis à Rama avant de partir pour l’exil de Babylone. D’après saint Matthieu, elle se lève encore une fois de son sépulcre, pour mêler ses cris aux cris des mères inconsolables.

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